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L’essentiel
La France a connu des températures très élevées au cours de la fin de l’été 2016. Bien que classiques pour une vague de chaleur de milieu d’été, les températures rencontrées ont été très exceptionnelles pour une fin d’été, et des valeurs record pour la période du 16 août au 15 septembre ont été atteintes. Une analyse à partir des simulations climatiques montre que de telles températures sont extrêmement peu probables sans la modification du climat par les activités humaines. Elle montre aussi que dans le futur des températures aussi élevées entre le 16 août et le 15 septembre seront fréquentes. Cela montre que les mesures d’adaptation aux vagues de chaleur doivent aussi s’étendre au mois de septembre.
L'événement
Après le 16 août 2016, le régime anticyclonique et le flux de sud durable qu’a connu la France ont apporté une masse d’air particulièrement chaude et sèche durant près de quatre semaines consécutives. Une vague de chaleur s’est produite entre le 23 et le 27 août avec des températures exceptionnellement chaudes pour une fin août de la côte aquitaine aux frontières du Nord et du Nord-Est. Avec la persistance remarquable de remontées d’air très chaud par la péninsule ibérique, la France a aussi connu une première quinzaine de septembre record avec une température moyenne de 22°C à l’échelle nationale, près de 4°C supérieure à la normale (1981-2010) (Figure 1-a). Ces fortes températures sont associées à la persistance remarquable de remontées d’air très chaud par la péninsule ibérique comme l’illustrent quelques trajectoires de masses d’air arrivant sur la région parisienne, le 13 septembre 2016 (Figure 1-b).
La première quinzaine de septembre a battu le record de température moyenne de l’indicateur thermique précédemment établi en 2006 et 1949 à 21,2°C (période de 1900-2016). Cette période a aussi été marquée par une série de records mensuels de température (minimale et maximale). Durant les huit premiers jours de septembre, des records ont été battus tous les jours quelque part sur le territoire, la plupart du temps dans le Sud, et parfois jusqu’en Bretagne. La journée du 13 a été la plus chaude à l’échelle nationale avec 24,7°C en moyenne, soit 7°C de plus que la normale. Cette valeur égale le record de la journée la plus chaude pour un mois de septembre (le 4 septembre 1949) mais presque 10 jours plus tard dans le mois.
Figure 1a : Évolution de l'indicateur thermique en France du 1er août au 30 septembre 2016 par rapport à la moyenne pour la période calculée sur 1981-2010. L'indicateur thermique est une moyenne sur 30 stations de mesure régulièrement réparties en France.
Figure 1b : Rétro-trajectoires de la masse d'air sur la région parisienne calculée avec le modèle américain HYSPLIT de la NOAA (5 jours précédant le 13/09). La trajectoire rouge est celle qui arrive à une altitude de 500m, la bleue une altitude de 1000m et la verte une altitude de 2000m.
Comment un tel événement est-il lié au changement climatique ?
Pour répondre à cette question de façon quantitative, nous utilisons ici les simulations régionales du climat issues du projet EURO-CORDEX. Ces simulations calculent une dizaine d’évolutions possibles du climat en Europe, en utilisant à chaque fois des modèles différents. Cet ensemble de simulations peut être utilisé pour calculer des probabilités de dépasser les valeurs de l’indicateur qui ont été observées pour la moyenne du 16 août au 15 septembre (22,3°C), voir la Figure 1a.
Des probabilités différentes sont obtenues durant des périodes climatiques différentes, permettant d’estimer l’influence des activités humaines sur ces probabilités. Seule une dizaine de modèles est utilisée pour faire cette étude, et ces modèles ne représentent pas tout le spectre des possibilités. Nous savons en particulier que les modèles ont une sensibilité aux gaz à effet de serre qui se situe dans une fourchette haute de l’ensemble des modèles utilisés dans le monde, en particulier pour les rapports du GIEC. Les estimations proposées ici sont donc probablement à considérer comme potentiellement un peu élevées. L’impact des activités humaines sur l’accroissement de la température moyenne et sur l’augmentation de l’intensité des vagues de chaleurs est toutefois déjà bien établi, qualitativement, dans le dernier rapport du GIEC.
L’analyse montre que l’événement de l’été 2016 avait une probabilité extrêmement faible de se produire dans le climat de la période 1971-2000, alors que sa période de retour actuelle se situe vers quelques décennies, et que, dans le futur, à l’horizon 2030 et plus encore à l’horizon 2050, ces températures seront fréquentes.
En ce qui concerne l’indicateur thermique journalier, les valeurs comme celles obtenues par exemple le 13 septembre (>24°C), peu probables dans le climat actuel, étaient de probabilité extrêmement faible dans le climat de la fin du XXème siècle. On constate sur la figure 2 un glissement de près de 15 jours entre les périodes passée et actuelle : la probabilité actuelle entre le 16 août et le 15 septembre est identique à celle entre le 1er et les 31 août à la fin du XXème siècle.
Figure 2 : Nombre de jours moyen, par période de un mois, trouvé dans l'ensemble de modèles EURO-CORDEX (ajusté des biais), pour lesquels l'indicateur thermique journalier est supérieur à un seuil (en abscisse), pour différentes périodes estivales et pour différentes périodes climatiques 1971-2000 et 2001-2030.
Que peut-on en conclure ?
Compte tenu des limitations concernant l’ensemble de modèles utilisés, ces résultats montrent que nous avons vécu en 2016 des vagues de chaleur tardives qui avaient très vraisemblablement une probabilité extrêmement faible de se produire dans un climat avec moins de gaz à effet de serre. Même si les températures sont plutôt classiques pour des grandes vagues de chaleur de milieu d’été, elles sont très exceptionnelles pour une fin d’été, et montrent que nous devons nous attendre à de tels phénomènes dans le futur. Des vagues de chaleurs en septembre peuvent poser des problèmes sanitaires plus aigus qu’en août du fait de la reprise des activités. Pour s’y adapter, il faudra donc probablement étendre au mois de septembre les mesures prises lors des épisodes estivaux.
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