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L’essentiel
Un épisode de 3 jours de pluies quasi-continues s’est produit sur le centre de la France les 29-30-31 mai 2016, occasionnant des inondations dans les bassins de la Loire et de la Seine, notamment sur plusieurs affluents. L’augmentation de fréquence de ce type d’événement à cette période de l’année n’est pas détectable dans les observations. En revanche, les simulations de plusieurs ensembles de modèles montrent une augmentation d’un facteur 1,5 à 2 environ de cette fréquence par rapport à un climat sans activité humaines ou à une période climatique de fin du XXème siècle. Il est donc possible que les activités humaines aient augmenté l’intensité et la probabilité d’occurrence de tels phénomènes, sans que les observations disponibles permettent de le confirmer.
L'événement
À la fin du mois de mai 2016, de nombreuses régions du Nord de la France ont connu des cumuls de précipitations particulièrement importants, dans certains cas exceptionnels. Sur la période du 28 (10h) au 31 mai (10h), les départements les plus affectés par ces fortes pluies ont été le Loir-et -Cher, le Loiret et l’Yonne. Avec en moyenne 95,9 mm sur le département du Loiret, la quantité d’eau tombée en trois jours est sans équivalent sur la période 1960 à nos jours. Sur l’ensemble de l’année, de tels cumuls sont atteints en moyenne tous les 10 à 50 ans, localement tous les 100 ans.
En Île-de-France, les cumuls relevés sur ces 3 jours sont atteints en moyenne tous les 10 à 50 ans (à Paris-Montsouris, on a relevé 83 mm).
Dans sa globalité, le mois de mai 2016 est exceptionnel. De nombreux records mensuels de précipitations ont été battus : à la station de Paris-Montsouris, on a relevé 176 mm, soit environ 3 mois de précipitations (ancien record : 133 mm en mai 1992). À Orléans, on a relevé 178 mm, également environ 3 mois de précipitations (ancien record : 148 mm en mai 1985). À l’échelle de la région Île-de-France, c’est le mois le plus pluvieux, tous mois confondus, depuis 1960.
Figure 1 : Rapport à la normale de référence 1981-2010 des cumuls mensuels de précipitations par département en mai 2016 (source SAFRAN).
Comment un tel événement est-il lié au changement climatique ?
Les indicateurs utilisés sont ici les cumuls journaliers moyens issus des bases de données SAFRAN de Météo-France et européenne E-OBS sur 3 jours maximaux pour chaque printemps (Avril-Mai-juin), sur le bassin de la Seine et le bassin de la Loire (figure 1). L’analyse de la série observée de l’indicateur ne montre aucune tendance significative. La variabilité d’une année à l’autre domine toute tendance. Afin d’augmenter l’échantillon d’étude, nous avons alors eu recours à de multiples simulations. Plusieurs ensembles de modèles ont été utilisés afin de s’affranchir de biais possibles d’un modèle donnée (ensemble multi-modèle EURO-CORDEX, ensembles constitué avec un seul modèle mais plusieurs simulations avec des conditions initiales différentes, HadGEM3-A, EC-EARTH&RACMO, weather@home). La validité de ces modèles pour ce type d’événement a été vérifiée par comparaison aux observations. D’autres ensembles de simulations ont été analysés mais écartés, car les biais de précipitations étaient trop élevés. Nous avons donc conservé uniquement les ensembles de simulations de qualité suffisante.
Avec ces ensembles, qui permettent de disposer de centaines d’années simulées, nous représentons le climat actuel, dans le premier jeu d’expériences, et un climat avec moins de gaz à effet de serre, dans un autre jeu. Les résultats sont alors comparés. D’une manière générale, les ensembles de modèles simulent une augmentation du risque de pluies extrêmes sur 3 jours due aux activités humaines, d’un facteur 1 à 3, entre ces deux jeux d’expériences. Ce facteur est obtenu pour le bassin de la Seine comme pour celui de la Loire.
Ces résultats sont globalement cohérents avec ceux présentés dans le dernier rapport du GIEC (2013), qui pointent également vers une augmentation des maximums annuels des cumuls de précipitations sur des périodes allant de un à quelques jours dans de nombreuses régions. Les simulations régionales utilisées ici permettent toutefois de préciser ce diagnostic de façon chiffrée. Ce signal, cohérent et significatif lorsque l’ensemble des simulations est considéré, reste difficile à discerner dans chaque simulation individuelle, car il est dominé par la variabilité naturelle des pluies.
Figure 2 : Domaines utilisés pour moyenner les cumuls de précipitations sur 3 jours.
Que peut-on en conclure ?
De façon générale les simulations montrent que les activités humaines ont probablement généré une augmentation de la probabilité d’événements comme celui vécu à la fin du moi de mai 2016. Pourtant, dans les observations, comme dans la plupart des simulations prises individuellement, ce signal reste faible, non significatif et dominé par la variabilité du climat. Ce n’est qu’en utilisant l’ensemble des modèles et des simulations qu’un signal significatif peut être trouvé. Cela incite à la prudence quant à la contribution des activités humaines. Toutefois, ce résultat est cohérent avec l’augmentation de la capacité de l’atmosphère à contenir de la vapeur d’eau dans un climat plus chaud. Nous en concluons qu’il est possible que les activités humaines aient augmenté l’intensité et la probabilité d’occurrence de tels phénomènes, sans que les observations disponibles permettent de le confirmer.
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